Interview
[Par Olga Bibiloni – 10 Décembre 2021 – La Provence]
Ce soir et demain, les musiciens accompagneront en live les images des films
C’est une saga culte créée par George Lucas qui a marqué l’Histoire du cinéma. C’est aussi une musique qui flotte dans notre mémoire et que ravivent notamment les premières notes des génériques. L’un des plus grands compositeurs de bandes originales, John Williams, l’a signée. Ce soir et demain, ces nappes futuristes et envoûtantes planeront sur le Dôme où seront donnés deux ciné-concerts : sur un écran géant de 20 m, les images de Un Nouvel Espoir (ce soir) et de L’Empire contre attaque (demain), accompagnées par l’Orchestre philharmonique de Marseille, que dirigera Christophe Eliot. Ce pionnier en France de l’exercice faisait partie, au Conservatoire de Paris, d’un orchestre spécialisé dans les concerts de musiques de film. De musicien de l’orchestre, après des cours auprès de grands professeurs, il s’est lancé à la baguette dans un premier rendez-vous, en 2015, invitant en musique à un Retour vers le futur.
Quelle est la différence fondamentale entre diriger un orchestre et diriger un orchestre pour un ciné-concert ?
La principale différence, c’est la présence de l’image. Il faut parfaitement synchroniser la musique avec le film, et sur Star Wars, c’est très pointilleux. C’est le ciné-concert le plus difficile que j’ai dirigé jusque là. Pour tout le reste, c’est le même travail. Je mets un point d’honneur à donner une musique de qualité, quel que soit le registre. Ce n’est pas parce que c’est de la musique de film, qu’elle est plus légère, plus facile… Ce n’est pas vrai. Il y a autant de travail d’interprétation à fournir quand on joue cette musique que dans la symphonie classique.
Comment avez-vous travaillé avec l’Orchestre de Marseille ?
Quand on travaille avec un orchestre professionnel et qu’il faut préparer un spectacle comme celui-ci, les répétitions sont prévues à l’avance mais on ne dispose jamais d’énormément de temps. On a commencé à travailler lundi et c’est absolument normal, on fait comme ça avec tous les orchestres : on a les partitions à l’avance, les musiciens qui ont envie de les travailler à l’avance peuvent voir ce à quoi ils vont se confronter. À ce niveau d’expertise musicale et instrumentale, tous les musiciens professionnels des orchestres sont capables de monter une telle production en une semaine.
Artistiquement, que demande-t-on à un orchestre quand on le fait jouer de telles partitions ?
Plein de choses ! Quand on travaille avec un orchestre, il y a une part de travail technique qui va être la mise en place, la justesse et les équilibres. Ce sont des choses assez basiques qui font que l’oeuvre va sonner à peu près comme elle est écrite. Pour que les gens jouent parfaitement ensemble, il ne faut pas qu’ils soient un peu devant ou un peu derrière. Côté artistique, le travail porte sur la manière de jouer telle ou telle phrase. On fait comme un acteur au théâtre : il ne lit pas avec un ton monotone, il a besoin d’interpréter… C’est ça, la musique, et c’est ça que l’on essaie de mettre au point. C’est ce que je défends dans la musique de film : on a besoin de ce travail musical. On peut évidemment se baser sur la scène du film, le fait de la visualiser, même pour ceux qui n’ont pas vu le film avant. On amène les musiciens à un certain phrasé, à dire les choses d’une certaine manière qui fait que la musique ressort plus belle.
À vos yeux, quel compositeur John Williams est-il ?
Aujourd’hui, il doit être l’un des compositeurs les plus prolifiques. Il annonce toujours qu’il va prendre sa retraite mais ne la prend jamais, il va avoir 90 ans et c’est lui qui fait la musique du prochain Indiana Jones ! C’est un vrai passionné. Il a le talent d’apporter à ses musiques de film, quelque chose d’évident que les gens vont immédiatement retenir mais aussi quelque chose de plus camouflé qui va très bien fonctionner avec les images. J’ai failli le rencontrer à Berlin il y a un mois mais à cause du Covid, malheureusement, les consignes sanitaires nous ont empêchés de l’approcher. Ceux qui le connaissent le décrivent comme quelqu’un de très humble, très gentil, qui continue à apprendre.